3 Pompiers morts au feu en 2003 : le non-lieu a ravivé la douleur

Dans l'affaire des trois pompiers seynois, morts au feu le 1er septembre 2003, la juge d'instruction de Draguignan a rendu le 31 mars dernier une ordonnance de non-lieu, écartant ainsi toute faute de commandement.
Le premier coupable, l'incendiaire, n'a jamais été retrouvé. Et la charge d'« homicides involontaires par imprudence, inattention, imprudence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité » n'a pas non plus été retenue.
« Le flash thermique, argument imparable »
Pour la première fois depuis cette décision de justice, et six ans jour pour jour après l'horrible drame, les familles s'expriment (1). Leurs plaies sont encore vives. « Pire, elles se sont intensifiées avec le non-lieu, et ce profond sentiment d'injustice qui nous habite depuis », expliquent-elles.
« On nous a bernés pendant six ans pour arriver à un non-lieu. Six ans de souffrance. Tout cela est inhumain pour nous », estime ainsi Carole Zedda.
La justice n'a finalement retenu qu'un coupable : le feu, amplifié par un phénomène de « flash thermique » (2). « On l'a vu sur les dossiers du Tanneron et de Cabasson (3) », estime Lucien Giovannini, lui-même ancien pompier professionnel : « Le flash - ou bulle - thermique, c'est l'argument imparable pour la défense du commandement. Quand ce phénomène arrive, plus personne n'est fautif. Mais si les camions se trouvaient là, à ce moment-là, c'est bien qu'on les y a envoyés... »
Entre colère, désespoir et dégoût, les familles ont du mal à faire leur deuil. « Il y a très peu de temps que je parviens à penser à Michel sans être obsédé par ce camion en flammes, dans lequel je me suis endormi avec lui tous les soirs durant de longues années », confie Lucien Giovannini.
« Pour nous, c'était », ajoute Nathalie Leballais-Zedda.
Écoeurés, épuisés, les membres des familles, en majorité, n'ont pas fait appel de ce non-lieu (4). « Des éléments accablants ont déjà été présentés en première instance, et nous n'avons déjà pas été écoutés. Je ne veux pas donner à ces gens-là une deuxième occasion de gonfler le torse », annonce Lucien Giovannini, avant de conclure : « Pour l'instant, ils sortent blanchis par la justice. Mais chez les pompiers, dans les casernes, les choses se savent... »
« On n'attend plus rien... »
Quand on leur demande ce qu'ils espèrent aujourd'hui, les membres des familles Giovannini, Lahaye, et Zedda, reçus séparément et sans s'être concertés, sont unanimes : « Plus rien. On ne veut pas d'argent, pas même d'officiers en prison. Simplement que quelqu'un aux commandes ce soir-là vienne nous voir, pour reconnaître simplement, les yeux dans les yeux : "OK, on l'admet, on a fait une erreur". On ne veut même pas qu'ils demandent pardon, on ne les croirait pas. »
Depuis six ans qu'ils attendent que soit faite la vérité sur la disparition tragique de Georges, Michel et Patrick, les familles ne se satisfont pas de celle de la justice.
-1. Var-matin a rencontré Lucien Giovannini (père de Michel), Émilie Zedda et Nathalie Leballais-Zedda (mère et soeur de Patrick), Richard et Morgane Lahaye (père et fille de Georges), puis Carole Zedda (veuve de Patrick).
-2. Ou « bulle thermique » : dans un fond de vallon riche en combustible, le gaz combustible prend la forme d'une bulle, qui ne peut pas se mélanger à l'air car sa température est trop élevée, provoquant finalement un violent embrasement généralisé.
-3. Le 31 juillet 1985, quatre pompiers du Luc ont perdu la vie au Tanneron, et le 21 juin 1990, trois sapeurs-pompiers et un jeune homme qui les accompagnait sont morts dans l'incendie de Cabasson.
-4. Aucun des membres des familles que var matin a rencontrés n'a pas fait appel.
source: var matin
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