Dans les années 60, la France du Général, la France populaire et joyeuse, dansait encore aux trois temps du musette
Mais bientôt la chanson allait être dépoussiérée. Il y avait bien les stars du moment, immuables dans leur (grand) art, et promu à devenir les représentants de ce qu’on nommerait bientôt le patrimoine de la chanson française : Tino, les deux Charles, Luis, Edith. De plus, Leo, Georges et le grand Jacques pointaient déjà le bout de leur nez, tandis que Félix, le Canadien, nous apportait son « p’tit bonheur ».
Tout à coup, comme un tsunami, le yéyé a débarqué en France. Le yéyé, cette musique pas compliquée (oserai-je le néologisme d’ »onomatopéesque » ) sur laquelle certains chanteurs se trémoussaient au rythme du twist.
Des noms nouveaux s’affichèrent au fronton des salles de spectacle : Sheila, Sylvie, Françoise et d’autres encore.
Au milieu de ce maelström de vedettes, en 1966, assez éloignée de la mode yéyé, une jeune seynoise, allait, avec son premier 45 tours atteindre les sommets, puis, lasse de ce métier où l’on doit sans cesse parader, poursuivre une carrière plus discrète.
Une seynoise de pure souche Danièle Denin, car c’est d’elle qu’il s’agit, se contentait dans sa région, de consommer sa passion, la chanson, dans un orchestre. Mais voilà… les bonnes fées existent. La sienne prit la silhouette d’un professionnel de la chanson.
Danièle Denin, nous l’avons rencontrée dans le jardin de sa villa de Six fours, elle a eu la gentillesse de répondre à nos questions.
LSI : Danièle, comment la chanteuse d’orchestre qui n’avait jamais quitté son Var natal, se retrouve à Paris avec ce qui allait être un immense succès : Michel, reprise de la chanson des Beatles ?
DD : J’étais à l’époque chanteuse de l’orchestre de Raoul Pol, et un soir, un producteur se trouvait dans la salle. Il me convainquit de le suivre à Paris, et là, il connaissait un des producteurs des Beatles qui cherchait un artiste pour enregistrer le fameux tube du groupe anglais. Plusieurs vedettes notoires étaient sur le coup, mais ces deux messieurs voulaient de l’inattendu et ont préféré confier l’interprétation à l’inconnue que j’étais alors.
LSI : Et puis, ce fut le succès que l’on sait et tout s’enchaîna.
DD : Oui, les 45 tours sortirent les uns après les autres avec je dois le dire un certain succès.
LSI : Mais alors, pourquoi, au bout de quelques temps, vous vous êtes peu à peu « retirée » du palmarès ?
DD : Pour plusieurs raisons. Un , je n’avais aucun soutien, la plupart des vedettes de l’époque avaient, derrière eux des gens disons… très malins. Et deuxièmement, je ne suis pas faite pour la parade, pour le devant de scène, il y a deux personnes en moi : Celle qui revit lorsqu’elle est en prise directe avec le public, là, je marche sur un nuage, mais dès que les projecteurs s’éteignent, je redeviens la femme qui n’a pas confiance en elle, qui craignant le contact des autres, s’enferme dans sa tour d’ivoire, c’est ce qui me fit passer parfois comme quelqu’un de hautain, de distant, alors qu’en réalité, j’étais – et je suis- timide, réservée.
LSI : Encore que, après vous être mise en retrait, de la chanson française, vous avez fait presque un tour du monde avec un corps de ballet brésilien ?
DD : Oui, j’en fus même la chanteuse.
LSI : Après cette période de devant de scène, avez-vous souffert, avez-vous été nostalgique ?
DD : Non parceque, comme je vous le disais, je suis faite pour chanter, mais tout ce qui entoure la vie de vedette, les médias, la célébrité, les mondanités…. M’indispose et m’insupporte, eu égard à ma timidité, et aussi à une certaine mélancolie que je "trimballe" depuis enfant. Toutefois, même aujourd'hui, il faut que je chante, et je fais d’ailleurs partie d’un groupe, mais pour moi, c’est un besoin… chanter, chanter toujours, devant un public ou dans mon jardin.
LSI : Merci Danièle Denin.