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Mais l'implication de M. Tapie ne se limite pas à soutenir ce projet de SCIC (société coopérative d'intérêt collectif). « J'ai demandé à La Provence de se positionner », nous a-t-il annoncé. L'homme d'affaires présente cette seconde offre comme « un plan B », dans l'hypothèse où les salariés ne parviendraient pas à boucler leur financement. Cette offre du titre provençal doit être financée par M. Tapie « à hauteur de 20 millions d'euros ». « Il n'y a aucun problème de financement », jure celui-ci. Il reste néanmoins mis en examen dans l'affaire de l'arbitrage Tapie-Crédit lyonnais – une mise en examen qu'il conteste – et une partie de ses biens est placée sous séquestre par la justice, ce qui maintient un doute sur sa capacité d'investissement, ou sa réelle motivation. Ne veut-il pas simplement ouvrir un front supplémentaire ?
Pourtant, « en tant qu'actionnaire de La Provence, Bernard Tapie ne peut pas ne pas regarder le dossier Nice-Matin, tant les logiques de proximité géographique sont fortes », estime Jean-Clément Texier, banquier conseil spécialiste de la presse. M. Tapie semble donc bien déterminé à jouer un rôle-clé dans ce dossier, sur lequel le tribunal de commerce de Nice doit trancher le 13 octobre. « En interne, le personnage ne fait pas l'unanimité, décrit un salarié. Mais les gens veulent surtout garder leur emploi. »
LA BATAILLE DES ANCIENS DE TF1
Un des candidats de juillet n'est plus de la partie : il s'agit de l'actionnaire de Libération Bruno Ledoux, qui a renoncé à déposer une offre détaillée. Selon nos informations, l'examen approfondi du dossier et l'importance des chantiers à assumer à Libé l'en ont dissuadé. Initialement intéressés, le groupe Azur Santé – spécialiste de l'assistance aux personnes dépendantes –, Georges Ghosn, précédent propriétaire de La Tribune et de France Soir, et l'éditeur de Paris Normandie n'ont pas fait connaître leurs intentions. En revanche, le belge Rossel a indiqué aux salariés, courant août, qu'il comptait déposer une offre remaniée.
Sa première offre, qui prévoyait 800 suppressions d'emploi, avait ému. Le propriétaire de La Voix du Nord et de L'Union de Reims, notamment, aurait selon nos informations amélioré son offre au plan social. Il conserverait finalement 300 postes supplémentaires en renonçant à externaliser complètement la distribution et l'impression. Rossel, qui propose un investissement de 20 milliions d'euros, s'est par ailleurs appuyé sur des figures locales, le promoteur immobilier monégasque Marzocco et l'homme d'affaires Iskandar Safa, pour gommer son image de groupe étranger. « C'est une offre très rigoureuse et professionnelle, avec une vraie vision industrielle », juge M. Texier.
La suite du feuilleton pourrait donc s'apparenter à un duel entre Rossel et Tapie. Clin d'œil de l'histoire : ces deux-là étaient déjà concurrents en 2012, quand Philippe Hersant cherchait un partenaire pour sortir de l'ornière La Provence et Nice-Matin. C'est finalement M. Tapie qui l'avait emporté et fait avaler aux banques un abandon massif de créances (170 millions d'euros). Autre clin d'œil : deux anciens cadres dirigeants de TF1, Etienne Mougeotte et Charles Villeneuve, sont présents, en tant que conseillers d'Iskandar Safa, dans l'offre Rossel… en rivalité frontale avec leur ex-patron, Patrick Le Lay, qui pourrait lui-même être rejoint par Robert Namias, ancien directeur de l'information du groupe audiovisuel.
source: Alexis Delcambre - Le Monde.fr