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Nicky
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Date du message : dimanche 13 septembre 2015 à 16h26


Alexandre Reis a créé la première Rizière de Bretagne


Alexandre Reis, agriculteur installé à Evran (22) depuis un an, devant ses parcelles (ou bassins) expérimentales de culture de riz (photo: Thomas BREGARDIS)
Alexandre Reis est un audacieux. À 57 ans, il s'est lancé un défi : produire du riz en Côtes-d'Armor. D'ici à trois ans, il espère labéliser le premier riz breton ...

Avec des pluies diluviennes dignes des moussons en cette fin août, on pourrait se croire en Asie. Il n'y a guère que les températures qui changent. Un temps presque idéal pour Alexandre Reis. Cet agriculteur qui n'aime pas faire comme les autres fait pousser du riz à Évran (Côtes-d'Armor). En Bretagne...

"Ils m'ont ri au nez"

« Faire pousser du riz en Bretagne... Quand j'ai annoncé ça, la première fois, au centre français du riz, ils m'ont ri au nez », s'amuse aujourd'hui Alexandre. Mais le résultat est là.

Dans les trois bassins qu'il a creusés à côté de sa vieille ferme de 1764, des petites tiges vertes, semblables à des brins d'herbe, poussent gentiment depuis le mois de juin.

« Il y a cinq espèces différentes. Le centre m'a envoyé deux variétés françaises et une italienne. Grâce à des contacts en Asie, j'ai pu me procurer une variété vietnamienne et une plus spécifique du Mékong, envoyée par un producteur local. Ces cultures sont expérimentales. »

"Un riz de Bretagne pour bientôt"

Durant trois ans, ce cultivateur loufoque va examiner la production de chacune des espèces. Pour l'instant, c'est le riz français qui tient le haut du panier. Mais cette tendance peut s'inverser en fonction du temps, des températures, de la façon dont le riz a été semé... À la fin des tests, l'espèce qui sera la plus abondante sera retenue pour obtenir le premier label « riz de Bretagne » qu'il compte développer et vendre.

À l'origine de cette initiative, insolite au premier abord, un constat très pragmatique : « Nous avons tellement de zones humides en Bretagne... Nous ne savons plus quoi en faire. » Sur ses cinq hectares de terrain, Alexandre Reis a un étang, alimenté par une source. « C'était l'idéal pour une rizière », s'illumine l'agriculteur qui ose tout ... @ suivre ...

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Nicky
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Date du message : dimanche 13 septembre 2015 à 16h27


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Et cette drôle de culture n'est pas sa seule originalité. Parmi les poules, les lapins et les deux cochons, qui sont davantage des animaux de compagnie que des bêtes d'élevage, Alexandre fait pousser du safran. En novembre, il a récolté le fruit de 5 000 bulbes qu'il a durement planté. À raison de 150 fleurs pour obtenir un gramme de la précieuse épice, sa production n'est pas énorme. Mais elle lui a permis de réaliser quelques recettes de gelées et de moutardes qu'il va pouvoir vendre d'ici à quelques semaines.

De la haute couture à l'agriculture

Une fierté pour cet homme de 57 ans qui s'est improvisé agriculteur il y a seulement un an et demi. Autodidacte de la culture-il a appris à faire pousser du riz en regardant des vidéos-Alexandre ne s'est pas lancé dans l'agriculture pour gagner sa vie. Mais plutôt par acte de résistance. « Je veux me battre contre les grands industriels, ceux qui ont mis des normes sur le vivant. Il y a un monopole international sur le riz. J'ai voulu montrer qu'avec un peu d'audace, on pouvait contourner ces grands groupes qui s'accaparent le savoir-faire des petits paysans », explique celui qui se définit comme un révolutionnaire.

Il y a également une sorte de revanche sur la vie dans la démarche d'Alexandre Reis. Né au Portugal et abandonné à cinq ans par ses parents, le jeune enfant a été exploité dans une usine de textile, à faire des mailles : « J'étais esclave. Je travaillais du matin au soir, en étant très peu nourri, jusqu'à ce que mon parrain m'arrache de là pour m'accueillir en France. » Arrivé à Paris, il se spécialise dans l'informatique, sans grande conviction.

Utilisant l'or qu'il a dans les doigts, Alexandre met à profit son passé. Il reprend le fil et l'aiguille, mais pour faire de la haute couture cette fois-ci. « J'ai papillonné de maison en maison, chez des grands noms que je n'ai pas envie de citer tellement ce monde me semble artificiel aujourd'hui. »

Un paysan venu de Paris

Sur cet univers d'apparat, Alexandre a définitivement tiré un trait en s'installant en Bretagne. « J'ai quitté Paris pour trouver une vie calme et apaisante. Je suis littéralement tombé amoureux de la Bretagne, après y avoir passé plusieurs vacances. J'aime les gens et les mentalités des gens d'ici. Je retourne à la terre pour m'enrichir. Non pas de superflu et d'argent, mais de vraie richesse, d'authenticité. »

Au milieu de ses épices et de ses plantes, l'ancien enfant esclave se sent libre. À regarder son riz pousser et s'émerveiller des petites choses de la vie, il fait penser à un Candide des temps modernes, illustrant parfaitement la fameuse maxime de Voltaire : « Il faut cultiver notre jardin. »
source: Émilie CHASSEVANT - ouest-france