La grande peste ? Une nuit sanglante ? La chapelle des morts ? Les ossements découverts à La Seyne ont livré leurs premiers secrets
Henri Ribot et l’engin qui a exhumé par hasard le premier squelette devant l’Atelier mécanique. Photo: Dominique Leriche
La grande peste ? Une nuit sanglante ? La chapelle des morts ? Les ossements découverts à La Seyne ont livré leurs premiers secrets - Les ossements découverts à La Seyne la semaine passée lors de travaux publics ont livré leurs premiers secrets, explique Henri Ribot, président du Centre archéologique du Var. Mercredi dernier aux Mouissèques, les ouvriers de la société Sade sont tombés sur un os … Les travaux menés sur le réseau d’assainissement de la corniche Giovannini ont ainsi dû être interrompus en raison de la découverte d’un squelette enterré à quelques mètres de l’Atelier mécanique. Depuis, d’autres corps ont été mis au jour et les engins de chantier se sont tus. Les archéologues, eux, ne chôment pas, à commencer par Henri Ribot, président du Centre archéologique du Var.
À quel stade en sont les recherches ? - Un premier diagnostic a été réalisé. On attend les résultats pour savoir s’il y a ou non un caractère archéologique intéressant à ce site. Il y a donc actuellement un travail de laboratoire qui est mené, à Aix, par les spécialistes du service régional de l’archéologie. L’idée est d’étudier les ossements pour en tirer des informations.
Les squelettes ont-ils "parlé" ? - Il semblerait déjà qu’il y ait entre six et huit corps. Tous des hommes, jeunes adultes. A priori, il n’y aurait pas non plus de sépultures distinctes.
Ce qui signifie ? - Cela va dans le sens d’un enfouissement rapide. On avait émis plusieurs hypothèses, dont celle qu’il s’agisse d’une fosse commune datant de la grande peste de 1720, qui avait décimé une partie de la population seynoise. Mais la maladie avait évidemment aussi tué des vieillards, des femmes, des enfants… Et on n’a pas non plus trouvé de traces de chaux dans le sous-sol. Donc, à moins que des corps autres que ceux de jeunes hommes viennent à être exhumés plus tard, l’hypothèse ne tient plus vraiment.
Quelle autre hypothèse tient la corde, alors ? - Dans le secteur, au fort Napoléon, on a connaissance d’une nuit sanglante lors du siège de Toulon, celle du 16 au 17 décembre 1793, qui avait entraîné la mort d’un millier de soldats. Des hommes jeunes, qu’il avait bien fallu enterrer quelque part, et pourquoi pas près d’une chapelle… Mais là, une fouille beaucoup plus large sera nécessaire pour en être certain.
Vous évoquez une chapelle. C’est la fameuse chapelle des morts ? - C’est ça. Cette chapelle dont l’existence est mentionnée en 1645 à côté du port de pêche des Mouissèques, et qui aurait disparu fin XIXe. A part un petit dessin de Vincent Courdouan en 1838, on ne sait quasiment rien d’elle. Elle aurait été rasée en 1906 lors de la construction de l’Atelier des turbines (Atelier mécanique, ndlr).
Que va-t-il se passer maintenant ? - Ça pourrait déboucher sur un suivi des travaux très précis. Le service régional de l’archéologie, et donc le préfet de région, doivent aussi décider dans les prochains jours de l’opportunité de fouilles complémentaires. De notre côté, on mobilise nos historiens locaux pour dénicher d’autres infos, notamment sur la chapelle.
On vous sent passionné par cette découverte ? - Forcément. Je suis très curieux de la suite. On a beaucoup de points d’interrogation dans la zone, sur la chapelle des morts ou le lieu d’inhumation des soldats en 1793. Ces travaux vont permettre d’éclairer notre lanterne sur tout un pan de l’histoire locale. source: MATHIEU DALAINE - var matin