Match judiciaire autour des victimes de l’amiante
Henri Tite-Grés, président de la Mutuelle de la Méditerranée (ici dans son bureau), espère un « jugement favorable ». Photo doc. E. E.
Les prud’hommes de Toulon sont le théâtre de plaidoiries acharnées sur les indemnités que pourraient toucher les anciens de la navale
A la barre, les débats fusent. Une avocate se met en colère. Une autre pousse en avant un arrêt de la cour de cassation qui n’avait jamais été cité dans la procédure. « C’est un argument nouveau, qui n’a pas été présenté, il est impossible de plaider ainsi, je demande le renvoi!» Suspension de séance. Murmures dans la salle.
Ainsi vont les audiences au conseil des prud’hommes de Toulon, en charge du dossier des anciens salariés des chantiers navals de La Seyne.
Énorme enjeu financier
Des hommes exposés aux poussières d’amiante pendant des années. « Une catastrophe sanitaire, puisque d’ici 2020, on parle de cent mille morts en France », n’a pas manqué de rappeler Me Sylvie Topaloff, avocate au barreau de Paris, une référence dans le combat des victimes de l’amiante.
Hier matin, les dossiers d’environ quarante anciens salariés étaient discutés. Face à eux, un fonds de garantie des salaires et le liquidateur de l’entreprise Normed, qui a expiré il y a plus de 20 ans. Les trois avocats se relayent pour attaquer sur tous les fronts la demande des ex-salariés. L’enjeu est énorme et se chiffre en millions d’euros.
« Il y a déjà eu des jugements favorables aux salariés », espère Henri Tite-Grés, président de la Mutuelle de la Méditerranée, en pointe sur le dossier amiante.
Pendant l’audience, les plaignants entendent que, « avant 1996, on ne savait pas que l’amiante était dangereuse ». Quant à leur préjudice, il faudrait « le prouver ». D’ailleurs, « des personnes qui sont ici, ont plus de 70 ans, cela démontre bien que les maladies liées à l’amiante ne sont pas automatiques ». Grattement de gorge.
Aujourd’hui, seuls les malades de l’amiante sont indemnisés. Les autres vivent avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête.
Me Topaloff plaide « le mépris des règles de sécurité » de la part de l’employeur. L’utilisation « massive » de l’amiante, « causant nécessairement un préjudice au salarié ». Même si la personne n’est pas malade aujourd’hui. Voilà ce qui constitue « un préjudice d’anxiété ».
Depuis février dernier, il y a en moyenne une audience tous les 15 jours. À la rentrée, la bataille reprendra. Délibéré le 20 décembre.
source: Sonia Bonnin - var matin