Les montages financiers en cascade de PIP ...
Les sociétés qui gravitent autour de PIP sont basées au Luxembourg, voire aux États-Unis notamment dans l'état du Delaware, un véritable paradis fiscal.
Notre entreprise a un organigramme de multinationale. On ne sait pas vraiment ce qu'il y a derrière PIP. »
Cette remarque désabusée, entendue parmi les salariés au moment de la liquidation judiciaire, en dit long sur la complexité des montages financiers qui entourent le fabricant de prothèses mammaires.
Entreprise cent pour cent varoise en 1991, PIP était détenue à sa création par Jean-Claude Mas, sa compagne et quelques associés. À la fin des années 90, PIP change de registre. Jean-Claude Mas se met en affaire avec Alain S. Garros. Présenté comme « administrateur de sociétés » ou « conseiller fiscal »au Luxembourg, il devient omniprésent dans la nébuleuse PIP.
En 1998, Milo Finance et Penny Holding sont créés et prennent le contrôle de PIP. À leur tête, il y a in fine Jean-Claude Mas et sa compagne, Dominique Lucciardi. Leurs noms sont invisibles au registre des sociétés du Grand-duché, si ce n'est sous l'appellation « actionnaire 1 et 2 ».
Au moment de la liquidation financière de PIP, ce sont bien eux qui apparaissent à la tête du montage financier. Les documents déposés au tribunal de commerce de Toulon révèlent qu'ils détiennent Penny Holding à parts égales.
Mêmes adresses
La nébuleuse compte une grosse demi-douzaine de sociétés anonymes, créées sur le même modèle et imbriquées entre elles : Graham Turner, Eurofortune, GT Immobilier, Costanza. Toutes sont domiciliées au Luxembourg, à des adresses presque communes : « 2, 4 et 6 rue Jean-Engling » ou « 43-45 rue Siggy ».Là où Jean-Claude Mas est censé habiter, puisqu'il revendique le statut de « résident luxembourgeois ».
Toutes ces sociétés affichent comme administrateur le même Alain S. Garros, déclaré successivement au « 45 rue Siggy »et au « 2 rue Jean-Engling ». En janvier 2007, il décède en se défenestrant, un suicide sans enquête de police, selon le journal Libération.Son compagnon dans la vie et en affaires hérite de ses nombreux mandats. Fabio Pezzera, mêmes adresses, même destin, serait décédé dans le même appartement, d'une overdose, quatre mois plus tard. En 2007, toutes ces sociétés furent placées en liquidation, sur requête de la justice luxembourgeoise (1).
Déclaré onze ans après
À partir de 2003, les Américains entrent au capital de PIP, qui ploie sous les difficultés financières. Milo Finance reprend la société Heritage World Wide, abondée par des actionnaires minoritaires. Trois millions et demi de dollars sont injectés entre octobre 2003 et avril 2004, selon les déclarations du directeur financier de PIP, Claude Couty, mis en examen la semaine dernière, comme M. Mas.
Les biens immobiliers connus se limitent à deux sociétés civiles immobilières, l'une de droit français, l'autre luxembourgeoise. La première, la SCI Lucas, possède les deux principaux sites de la société PIP et a réussi à échapper à la liquidation judiciaire grâce une décision de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en janvier 2011.
Quant à la SCI Prince Michel, fondée en 1998, elle a failli glisser des doigts de Jean-Claude Mas et Dominique Lucciardi. Ces derniers ont fait enregistrer en 2010 un acte de cession en leur faveur datant de 1999, soit onze ans après. « Le 30 octobre 1999, mentionne le registre de commerce, Milo Finance et Graham Turner ont cédé à Jean-Claude Mas et Dominique Lucciardi les cent parts sociales de la SCI. »
Ce qui est en jeu est l'achat d'une luxueuse villa sur les hauteurs de Six-Fours. Celle que les gendarmes ont perquisitionnée jeudi dernier. Mais ce bien immobilier est déjà à l'abri. En septembre 2010, Jean-Claude Mas donne ses parts à sa compagne et à son fils. Officiellement, il n'a plus de patrimoine à son nom. Devant les enquêteurs, il affiche pour tout revenu une retraite de 1 650 euros.
1. Pour absence de siège social connu et comptes sociaux non déposés depuis 2002.
source: Sonia Bonnin - var matin