Les recrutements fantasques du patron de PIP
Jean-Claude Mas à sa sortie du tribunal de Marseille, le 26 janvier dernier.
Jean-Claude Mas, le patron de l'entreprise varoise Poly Implant Prothese (PIP) n'avait pas son pareil pour recruter ses salariés.
Selon des procès verbaux d'audition que Le Figaro a consultés et qui ont été réalisés dans le cadre de l'enquête préliminaire sur le volet de la tromperie par les gendarmes de la région PACA, les formations des recrutés étaient loin d'être en adéquation avec leurs postes chez PIP. Une aubaine pour une entreprise qui faisait coexister deux gels pour fabriquer les prothèses: l'un homologué, «le Nusil», et un autre mis au point par Jean-Claude Mas, «le PIP» qui ne bénéficiait d'aucune autorisation et qui était fabriqué à partir d'huile industrielle. Une situation que résume ainsi une salariée: «Je me souviens qu'une fois monsieur X (...) qui connaît très bien le milieu avait dit 'c'est très louable de la part de PIP d'employer des travailleurs handicapés mais il ne faut pas mettre des aveugles aux contrôles'. Avec le recul cette phrase me semble adaptée». Les auditions de ces ex-salariés ont eu lieu en janvier, avril, mai et octobre 2010.
Quand le soudeur devient directeur du directoire
David *, 62 ans, a «notamment travaillé pour les chantiers de La Seyne-sur-Mer en tant que soudeur, charpentier de fer pendant douze ans» avant de rejoindre MAP qui allait devenir PIP en 1991. Il y a occupé le poste de responsable de la production, puis de directeur de la production avant de devenir directeur du directoire. Question des gendarmes: «Comment, avec votre cursus, êtes-vous rentré dans cette société qui n'avait rien à voir avec vos compétences professionnelles?». Réponse: «Monsieur M. (qui travaillait à la production chez PIP et dont la femme était la directrice administrative de l'entreprise, NDLR) est le frère de madame Lucciardi (l'ancienne compagne de Jean-Claude Mas qui dirigeait MAP, NDLR) qui est la cousine de mon épouse. C'est comme ça que je suis rentré dans cette société».
Un patissier en production
Mathieu *, 44 ans résume son parcours: «J'ai fait un apprentissage de pâtisserie-boulangerie. J'ai travaillé quelques années en boulangerie-patisserie. Après j'ai travaillé chez Mammouth» avant d'intégrer PIP au début des années 90 au poste d'assistant de production. Question des gendarmes: «Comment êtes-vous rentré dans cette société?». Réponse: «Par monsieur et madame M. Ce sont des amis». Question: «En fait on peut dire que vous avez appris votre métier sur le tas?». Réponse: «Oui, je n'ai aucun diplôme». «Avez-vous eu des formations?». «En fait, les formations se passent sur le tas, comme j'étais sérieux et avenant j'ai eu l'opportunité d'apprendre sur place». «Concernant votre dernier poste, quel type de comandes passiez-vous?». «J'étais en charge des commandes de masques, gants, tout ce qui sert de protection (...) et aussi la fameuse cuve Brenntag». Il s'agit en fait de l'entreprise qui fournissait l'huile de silicone dont PIP se servait pour fabriquer les prothèses non conformes. Question: «Saviez-vous que le gel PIP n'était pas autorisé?». Réponse: «Oui, monsieur Mas disait que son gel était meilleur et je me souviens même que le service recherche et développement disait que le gel était bon».
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