PIP a laissé une ardoise de 8,9 millions d'euros
La société PIP avait déjà perdu en justice, avant le scandale, face à des femmes victimes. (photo: D. L.)
Les dettes déclarées auprès du mandataire judiciaire de Poly-Implant-Prothèse atteignent des montants considérables. Mais les victimes actuelles ne sont pas prises en compte
Longue liste que celle des créanciers de PIP. Épicentre d'un scandale sanitaire international, la société Poly-Implant-Prothèse a laissé derrière elle le souvenir d'un mauvais payeur. Dès 2009, et son placement en procédure de sauvegarde, PIP a révélé une trésorie exsangue : 8,9 Me de créances ont été déclarés par des dizaines de sociétés et d'organismes.
Banques, fournisseurs, transporteurs, Trésor public. Les sommes les plus importantes sont celles revendiquées par l'URSSAF (400 000 €) et Nusil (450 000 €), producteur américain de gel de silicone… le gel médical que PIP aurait dû utiliser pour remplir ses prothèses mammaires. Jean-Claude Mas en personne, le fondateur de la société, n'a pas hésité à déclarer que PIP lui devait de l'argent : 37 000 €. Et sa compagne, gérante d'une société civile immobilière, demande 220 000 € de loyers que PIP n'a pas payés.
Il y a peu de femmes victimes parmi les créanciers. Vingt et unes Anglaises, deux Irlandaises et une Australienne sont déclarées, pour des montants moyens de 70 000 € chacune. Soit un total de 1,7 Me. Deux Françaises figurent sur la liste, des femmes qui ont gagné en justice lors de procès antérieurs à la révélation du scandale (lire ci-dessous).
Question de délais
En janvier 2012, l'avocate Christine Ravaz a tenté de déclarer sa cliente, porteuse de prothèses, en vue d'un possible préjudice.e liquidateur judiciaire a refusé le dossier, au motif que le délai est expiré : « Dans le cadre de ce dossier, (...) la date de parution [réglementaire] est du 22 mai 2009 ». En 2012, ce serait trop tard. Hier, deux avocats ont demandé au tribunal de commerce de Toulon de rouvrir cette liste des créanciers. « Il est important de figurer sur la liste, car cela peut ouvrir des droits aux victimes », argumente MeRavaz. Il était difficile pour une femme de se déclarer, avant même de connaître la tromperie dont elle est victime.
« J’ai gagné, mais j’ai perdu face à PIP »
Patricia est l’une des deux Françaises inscrites sur la liste des créanciers de PIP. La Toulonnaise a gagné face au fabricant, au bout de quatre longues années de procédures, pour une prothèse qui s’est entièrement dégonflée. Sa chance? L’implant était rempli de sérum physiologique et non de silicone. Entre-temps, la deuxième prothèse s’est vidée elle aussi. Il lui reste deux coques vides, aplaties, durcies, qui se déplacent dans chaque sein et sortent parfois en pointe. « C’est très dur à vivre, je me sens touchée dans mon intimité… mais je n’ai pas l’argent pour payer l’opération ». Elle a pourtant gagné 15000 € contre PIP, en 2009. Mais PIP ne l’a jamais payée. Aujourd’hui, cela fait sept ans qu’elle se bat : « Je ne demande pas d’argent, mais qu’on m’enlève les prothèses ».
Comme elle n’est pas victime de la tromperie sur le gel de silicone, elle ne peut pas porter plainte au pénal. Comme ses prothèses sont esthétiques, la sécurité sociale ne prend rien en charge. Un chirurgien lui a fait un devis à 5000 €. Le dernier espoir de Patricia, c’est cette fameuse liste des créanciers.
source: Sonia Bonnin - var matin